Rien de rien.
Il n’y a rien à faire. Rien à faire d’autre qu’attendre. Ce n’est pas une nouveauté, loin s’en faut, mais là j’en ai la confirmation de source sûre et respectable. Aujourd’hui j’ai trouvé un stage. Pas simplement un stage d’ailleurs, LE stage, celui que je suivrais tout au long de ma formation en CAP Pâtissier. Excellente nouvelle me direz-vous, c’est également ce que j’en ai pensé. La rencontre avec le chef pâtissier prêt à m’accueillir fut tout à fait cordiale, il semblait attentif à ce que je lui racontais, à tel point qu’il a attendu que je termine pour me dire « OK, pas de problème, c’est bon pour moi ». Tout simplement. Si je n’ai aucune certitude sur cette aventure de la reconversion professionnelle du fait de mon côté tributaire des administrations en tous genres, une chose se confirme cependant : lorsque je parle de mon projet avec des professionnels, des pâtissiers en l’occurrence, toutes mes demandes trouvent un oui ponctué d’encouragements. Voici ma consolation au coeur de cette étape où il n’y a rien à faire. Rien à faire d’autre qu’attendre. Si je devais résumer en une phrase et demie les 282 jours passés, je dirais qu’il m’a fallu lutter contre le vent soufflé par Pôle, garder la motivation pour monter de toutes pièces un projet de création d’entreprise face à l’incapacité contagieuse et souvent reconnue des différents conseillers qu’il m’était donné de rencontrer, tenter de réanimer ma conseillère référente tout en postant des avis de recherche, trouver et obtenir des stages, sourire pour décompresser, faire des pieds et des mains pour deux clics sur un site internet, trouver une entreprise pour réaliser mon immersion dans le monde professionnel durant le CAP, m’informer, me former, sourire encore pour re-décompresser… Toutes ces étapes sont indispensables pour mener à bien l’aventure que j’ai choisi, nous sommes sans aucun doute nombreux à être passés par là, nous sommes les mêmes à ne pas comprendre l’intérêt de semer de telles embuches. Mais quelqu’un y trouve un intérêt, cela j’en suis convaincu. Je ne suis pas meilleur que les autres candidats, ce n’est pas le sujet, je suis simplement celui qui a décidé d’évoquer la situation publiquement. Cette situation où il n’y a rien à faire. Rien à faire à part attendre une réponse de personnes qui, au fond, n’en ont rien à faire. Lorsqu’on est au coeur de ce système, qu’on le décortique, qu’on essaie de le comprendre, c’est justement là qu’on ne comprend rien. Ou que l’on comprend trop bien justement. Et il n’y a rien à faire. Rien à faire d’autre qu’attendre. Attendre quoi ? Que ceux qui ont le pouvoir de prendre des décisions n’en aient plus rien à faire ? Mais comment cela pourrait-il arriver ? Ces gens-là voient quelle est ma situation et celle de mes co-détenus, ils ne veulent surtout pas la vivre à leur tour alors chacun reste bien sagement dans son fauteuil, sans bouger. Surtout sans bouger. Au jeu des chaises musicales, celui qui quitte sa place risque de ne pas la retrouver au prochain tour. Et croyez-moi, ils connaissent la chanson.
Il était question de former les chômeurs et d’ainsi les orienter vers des métiers dits « en tension » ou bien de les assister dans leur souhait d’entreprendre. L’idée venait d’en haut. Il aurait fallu préciser que les chômeurs seraient formés trois par trois, à raison d’un trio par an et par région. Et encore une fois, peut-être que je serais l’un des trois. Cela flattera sans doute mon égo pendant quelques instants mais ne contribuera pas à me redonner foi en l’homme. L’homme de pouvoir.
En attendant de finir d’attendre, je me disais que finalement, le seul endroit où il y aura toujours de la place pour tout le monde, sans sélection, sans financement, avec ou sans projet et surtout sans attention, c’est chez Pôle.